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L'air lui fouetta le visage lorsqu'il atterrit silencieusement sur l'herbe. Il devait être à quelques kilomètres de Poudlard, dans un endroit indétectable à tout autre sorcier. Ses amis et lui y avaient veillé.


La barrière invisible l'autorisait à passer, conscient qu'il ne porterait jamais aucun préjudice à ce que la maison qu'elle protégeait, abritait. Il avança sur la pelouse parfaitement entretenue, appréciant brièvement la nouvelle clôture que son meilleur ami avait installée. La première tentative de bricolage de Ron avait provoqué le plus grand fou rire qu'il eut connu. Il avait failli brûler la maison du jeune couple.


Il avança sur le porche et n'eut besoin d'annoncer sa présence que celle-ci s'ouvrit sur sa meilleure amie, un large sourire sur les lèvres. Son regard se porta aussitôt sur l'enfant qu'elle portait contre son épaule, bien éveillée pour une heure si tardive.


_Harry, entres donc, le salua-t-elle en s'effaçant du cadre.


Il pénétra dans les lieux, retirant son manteau au passage qu'il accrocha au pendant du vestibule. La maison de ses meilleurs amis était à l'image de ces derniers, simple et chaleureuse. Elle était faite d'un bois clair et s'ouvrait sur un large salon où s'attenait une cuisine parfaitement aménagée par Mrs Weasley. A l'étage, se trouvaient les chambres et une immense bibliothèque où son amie pouvait se plonger pendant des heures.


Il l'accompagna jusqu'au salon où il la trouva en train de regrouper quelques dossiers alors qu'une Plume se déposait délicatement sur un parchemin bien rempli. Elle dirigeait le Département des Mystères. Son intelligence et sa discrétion étaient parvenues à convaincre ses homologues de la pertinence de sa nomination. Elle était intransigeante quand cela l'exigeait et étudiait chaque cas avec un discernement qui forgeait l'admiration. Harry n'aurait pu imaginer sorcière plus apte à ce rôle.


_Désolée du désordre, Séren s'est réveillée au moment où je terminais un rapport. Peux-tu la prendre un moment ? J'aimerais faire disparaître tout cela. Je sais qu'elle n'y comprend rien mais j'ai l'impression de l'exposer aux horreurs de notre monde en étudiant ces dossiers. C'est stupide, je le sais mais…


_Ne te justifies pas, Hermione. Je te comprends, déclara-t-il en tendant les bras vers sa filleule.


Cette dernière gazouilla gaiement en lui adressant le plus beau sourire qu'il ait vu. Il la teint contre lui, le contraste étant saisissant. Elle était si fragile dans ses bras qu'il craignait presque de la briser. C'était cette même crainte qui l'avait retenu de s'en approcher après sa naissance. Hermione avait dû lui asséner une tape monumentale pour qu'il reprenne ses esprits. Mais pouvait-elle vraiment lui en vouloir ? Ce qu'il voyait tous les jours le rendait si indigne de son innocence. C'était ce qui l'amenait à comprendre les propos de sa meilleure amie.


Séren tenta de lui saisir ses lunettes avant qu'il ne la replace dans ses bras, l'éloignant de la source d'attention. Cette petite était après tout la nièce des jumeaux Weasley et avait déjà réussi à briser ses verres plus d'une fois. Il s'installa sur un des sofas et d'un mouvement de la tête invoqua de légères lumières sur la paume de sa main, ce qui enchanta de suite l'enfant qui chercha à les attraper sans succès. Elles circulèrent sur ses petits doigts, parcourant ses bras avant de revenir sur la paume d'Harry.


Il sentit le regard de sa meilleure amie sur lui et releva les yeux pour trouver son air attendri.


_Qu'y a-t-il ?


_Rien, c'est juste que je chérie ces moments, vois-tu ?


Il hocha lentement la tête. Il était vrai que dans ces temps incertains, il n'était jamais sûr de ce qui les attendait. Leur vie était en jeu quotidiennement et chaque moment qu'il vivait pouvait être leur dernier. Hermione se secoua mentalement et fit disparaître d'un claquement de doigt les documents qu'elle avait en main. Elle invoqua un plateau, deux tasses et une théière brûlante.


_Un peu de thé ?


_Avec plaisir, merci, répondit-il alors qu'une tasse s'installa sur la table près de lui.


_Où est passé mon époux ? répliqua Hermione, en prenant une gorgée de son propre thé.


_Il était en mission à York. Il ne devrait pas tarder. Je l'ai devancé.


_Une raison particulière à cela ?


Hermione Granger était d'une rare clairvoyance, certes, mais ce qui la rendait encore plus redoutable c'était qu'elle connaissait parfaitement son jeune ami. Elle en maitrisait le moindre cheminement de pensée. Elle savait donc que, bien que sa visite ne soit pas surprenante en soit, la légère tension qui habitait le visage de son ami n'était pas anodine.


_Aucune, juste un besoin de discuter.


_Craches le morceau Harry.


Il eut un sourire à la manière assez directe qu'elle avait parfois d'aborder les choses, signe de l'influence grandissante de Ron. Il était donc vrai que les époux s'influençaient mutuellement. Il posa son regard sur sa filleule, qui semblait s'être lassée des lumières et qui jouaient maintenant avec ses doigts. Il caressa ses boucles rousses et déposa un bref baiser sur le sommet de sa tête.


_Je retire ce que j'ai dit à ta naissance. Je te souhaite de ne pas être aussi brillante que ta mère, morigéna-t-il provoquant le rire de la principale intéressée.


_ Absit reverentia vero (NDA : « Ne craignons pas de dire la vérité »)


_Par Merlin ! Epargnes-moi ça, Hermione, maugréa-t-il en levant les yeux au ciel redoublant l'hilarité de la sorcière.


Il ne put retenir un sourire en la voyant ainsi. Des moments rares, effectivement. Séren bailla doucement et se blottit davantage contre lui. Aucun doute, il devait sincèrement l'ennuyer. Il la ramena davantage contre lui, nichant sa tête contre son cou.


_La sœur de Ron a été attaquée par Greyback, hier soir.


_Effectivement, elle a permis que nous l'arrêtions. Une véritable victoire.


_ Je suis passé la voir juste après à l'infirmerie. Cet événement l'a énormément secoué.


_Cela n'aurait pu en être autrement. Elle a été très courageuse.


_Une véritable Gryffondor, sans aucun doute, déclara Harry avec un sourire.


Sa meilleure amie le contempla longuement, avant de se rapprocher de lui et de poser sa tête sur son menton, l'air inquisitrice.


_Tu serais donc venue jusqu'ici pour me dire que ma belle-sœur est une véritable Gryffondor. Cela ne te ressemble pas, ironisa-t-elle en tentant de retenir son amusement.


_Non. Elle m'a demandé de lui apprendre à se battre pour qu'elle n'ait jamais plus l'impression d'être aussi…désarmée.


_Qu'as-tu répondu ?


_A ton avis. Je me suis vu en elle. Je ne pouvais en faire autrement.


_Cela ne me semble pas si absurde. Elle est particulièrement visée en étant une Weasley. Son ascendance ne penche absolument pas en sa faveur. Lui permettre de se battre me paraît être la chose censée à faire.


_Comment Ron réagirait-il à cela ?


_Pour le moment, il serait préférable qu'il ne soit pas mis au courant, répondit-elle finalement.


_Tu es donc en train de me demander de mentir à ton mari. N'as-tu pas fait vœu de loyauté ?


_Harry, je connais justement « mon mari ». Il sera le premier à s'y opposer. Et s'il lui arrivait quelque chose ? Comment s'en remettrait-il ? J'ai également fait vœu de le protéger dans la mesure de mes moyens. Cela me semble tout indiquer.


_Vu sous cet angle…Bon sang, je suis heureux d'être de ton côté.


_Et donc, quand commenceront ces cours ?


_Dès demain. Elle est aussi tenace et déterminée que Mrs Weasley.


_Je veux bien te croire. Et très intelligente, qui plus est, poursuivit-elle très sérieuse.


_Véritablement brillante. Ne le dis pas à Ron, mais parfois je me demande s'il partage le même ADN.


_Pour celle-là, je te dénoncerais.


Il partit d'un grand rire, ce qui dérangea Séren qui gémit doucement. Harry resserra sa prise sur celle-ci et indiqua à Hermione qui l'a ramené à l'étage. Elle le talonna de près alors qu'il voyait passer plusieurs clichés accrochés au mur où étaient représentés les membres de leur grande et étrange famille.


La chambre de Séren était semblable au reste de la maison, sans trop d'apparat. Un berceau conçu main par son père, une mini bibliothèque agencée par sa mère et quelques jouets qui trônaient par-ci par-là. Il déposa doucement l'enfant dans son berceau, la recouvrit et la contempla un moment.


_Elle est magnifique, Hermione.


Celle-ci opina lentement, en déposant sa tête sur l'épaule de son meilleur ami.


_Oui. Elle représente tout pour moi et je crains tellement…


Elle se tut au milieu de sa phrase et n'eus besoin de poursuivre. Il se retourna vers elle, se baissa légèrement à sa hauteur afin que ses prunelles puissent fourrager dans les siennes. Elle tint son regard même si l'inquiétude n'avait quitté ses traits.


_ Il ne lui arrivera rien, Hermione. Je t'en fais le serment.


Elle ne doutait nullement de ses propos mais elle ne pouvait faire taire cette peur qui lui était viscéral. Elle ne pouvait contrôler ses pensées et finissait inlassablement par se demander : et si.


Ne voulant pas s'attarder sur cela, elle le prit par le bras et ils sortirent ensemble de la chambre.


Une fois dans le couloir, elle poursuivit son interrogatoire.


_Et donc ? Ginny ?


_Quoi donc ?


_Harry, tu sais très bien que tu ne peux rien me cacher. Serais-tu intéressé par la plus jeune des Weasley ?


_Premièrement, elle serait la seule susceptible de m'intéresser au sein de la fratrie Weasley. Deuxièmement, Ron risquerait de tuer pour simplement l'avoir suggéré, troisièmement, elle est mon élève et de ce fait, je ne pourrais décemment la voir de cette manière…


_Autant de raisons qui ne répondent aucunement à ma question. Essaierais-tu de noyer le poisson ? Répliqua-t-elle en s'arrêtant à la dernière marche, atteignant ainsi son regard, lui qui se trouvait juste en dessous.


_Que souhaites-tu savoir ? Reprit-il en croisant les bras sur sa poitrine.


Un geste défensif ? Elle le reconnaissait bien là. Elle n'avait donc pas tord. Harry n'était pas insensible au charme de la jeune femme mais il ne l'avouerait pas. Elle le connaissait. Il préférerait nier plutôt que de s'embrigader dans quelque chose qu'il ne pourrait maîtriser. Il préférerait s'enfermer dans un mutisme qui lui permettrait de ruminer ses plus sombres pensées.


Ce fut Ron qui interrompit leur jeu de regard lorsqu'il franchit la porte et les trouva juste devant lui. Il se débarrassa de ses affaires avant de s'avancer vers son épouse, bousculant au passage Harry qui trébucha légèrement. Il embrassa furieusement cette dernière provoquant l'air scandalisé de leur meilleur ami. Il se détourna d'eux en se frottant les yeux pour se retirer l'image de la rétine.


_Ron, tu avais promis de ne plus faire cela devant moi.


_Ca t'apprendra à m'envoyer à York, Vieux !


Hermione les laissa là, partant dans un grand rire, alors qu'elle se dirigeait vers la cuisine. Bon sang, ce qu'elle pouvait les aimer.

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